Je ne sais pourquoi, mais depuis quelques temps,
J’ai du mal à rester seul ne serait-ce qu’un moment.
Je me sens comme poussé à fuir
Cette solitude qui me fait tressaillir.

Ce ne sont pas les bruits qui me font sursauter,
C’est l’aiguille de l’horloge qui se met à tricoter,
Je me sens crispé, fiévreux et alarmé,
Anxieux d’être atteint de maux qu’on ne saurait soigner

Alors je prends du temps pour moi,
En passant le temps avec les autres,
Je court-circuite ce surmoi,
En rompant le pain avec mes apôtres

Et je parle, pour ne jamais rien dire,
Car ce sont mes silences qui pourraient m’assourdir
Je ris pour asphyxier mes peurs,
Je crie pour transfixer mes pleurs

Je ne sais pourquoi, mais depuis quelques temps,
Je me réveille la nuit, le souffle haletant,
Dans le sens des aiguilles, je tourne en rond des heures,
Je reste en alerte jusqu’aux premières lueurs

J’ai l’esprit qui divague, un cauchemar éveillé,
Et depuis quelques mois, le silence en est l’acmé,
Je vois des ombres qui passent devant mes yeux
Je sens leur présence, et leur discours insidieux

Pas moyen de dormir, ni de faire le veilleur
Je termine la nuit devant mon téléviseur,
Mais quand je tombe de fatigue, dans un second état,
Je le sens aux aguets, prêt à bondir sur moi.

Ma créature de rêve me tient en horreur
Ne m’accorde aucune trêve, me traque dans la torpeur,
Quand je brandis le glaive, elle éclate d’un rire moqueur
Infiltre ma sève, y joue l’esprit frappeur

Je le sens qui s’agace, un peu plus chaque matin,
Et je le sens vivace, quand la lumière s’éteint
Je sens son haleine tiède tout le long de mon cou
Il cherche à me soumettre, me faire plier le genou

Il me traite d’imposteur, cherche à me posséder,
Quand il me parle la nuit, je suis à deux doigts de céder,
Sacrifier ma vie, mon âme pour une chimère
Telle est son invective, son projet doux-amer

Quel que soit le moment, je vis avec cette Minerve
Jamais elle n’abandonne, jamais elle ne se tait
A tout moment il y a quelqu’un qui m’observe,
Qui me juge et me jauge, voudrait me refaire le portrait

Quel que soit le moment, je vis avec cette Minerve
Jamais elle n’abandonne, jamais elle ne se tait
A tout moment il y a quelqu’un qui m’observe :
C’est cet enfant idéaliste que j’étais