L’usage d’une vie est un champ délicat,
Au même diapason tous ne s’accordent pas
En termes de dissonance l’humain est un expert,
Il vit en permanence sous le joug de ses pairs.
Si nos pères ont prévu un espace pour chacun,
Dans toute société certains ne s’emboitent pas.
Ils errent de place en place, attendent demain en vain,
Et ne semblent sagaces qu’au jour de leur trépas.
La démesure des uns nourrit en abondance
La frustration des autres qui à leur tour présentent
De pleines pages noircies de vaines doléances
Qu’ils crient au pied des tours de qui les représente.
Alors s’instaure un rite que nous connaissons bien,
Où certains portent la voix de ceux qui n’ont plus rien :
Ils sont sollicités, en tant qu’ambassadeurs,
Mais ressortent corrompus par l’or des oppresseurs.
A leur tour ils répètent les fameuses litanies,
Qu’ils exécraient jadis alors simples soumis.
Ils bâtissent leur tour d’une terne couleur,
Celle qui a teint leur âme ainsi que leurs valeurs.
Il ne faut pas longtemps à ceux qui sont floués
Pour mettre au ban ceux-là qui furent leurs députés.
De fort ressentiment en soulèvement social,
Le contrat est rompu, la foule devient bestiale.
Vient alors l’affrontement entre deux forces contraires,
Se toisant un instant pour mieux armer leurs serres.
Ils attendent fébrilement le faux pas de l’ennemi
Pour épancher leur rage en se ruant sur lui.
Quelle que soit la faction qui semble ouvrir le bal
Les nouveaux partenaires font vite jeu égal,
Car en bombant le torse ou en haussant le ton,
Qui recourt à la force voit la loi du talion.
Je voudrais tant que cesse cet affreux jeu de dupes
Qui consiste à abattre, et vite substituer
Ceux qui nous muselaient d’une manière abrupte
Par d’autres qui fédèrent et complotent pour régner.
Ils bâtiront leurs tours sur les cendres d’une autre
Une tour de Babel plus vaste et bien plus haute
Jusqu’à ce qu’à nouveau une voix discordante
Vienne passer par le fer, cette caste régnante
Insensible à nos maux, la Terre nous inspire :
Comme ses révolutions, les nôtres sont légions
Bien loin de se calmer ou de se contenir,
Elle tourmente le Soleil, et l’Homme tourne en rond
Va-t-on un jour contrer ce vilain tour céleste
Et vivre enfin en paix pour le temps qu’il nous reste ?
S’affranchir de nos maitres, rompre l’expectative
Ne plus bâtir de tours barrant nos perspectives
Chercher une vie simple, humble et sans prétention,
S’attacher à bannir les souhaits imprécatoires
Et puis construire un lieu, où mettre en détention,
Ceux qui érigent des tours dominant la terre car,
Que tourne la Terre ou que la Terre ne tourne
Ce qui entoure la terre de ses ternes tours
Vient tour à tour du fer croisé entre sourds
Ou bien du ministère montrant ses fiers atours
On a toujours affaire à tous ces vils vautours
Qui nous mènent à la guerre au rythme des tambours
Et tous ces dignitaires qui ne donnent en retour
Que travail subalterne et titre de séjour
L’usage d’une vie est un chant délicat,
Il est assez fréquent d’en tirer quelque aria
Que ton oeuvre soit simple, fortement recherchée,
Qu’elle succède à ses pairs, ou soit improvisée,
Ne perds donc pas de temps en tergiversations :
Attèle-toi à présent à sa composition.
Car du chant de ta vie, si tu ne t’impliques pas
Certains en écriront la partition pour toi